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L’Aigle de Guerre, ou les campagnes napoléoniennes vu du Japon


En 2001 sortait dans nos contrées un jeu assez atypique sur Game Boy Advance. Il s’agissait d’un jeu de stratégie basé sur les campagnes napoléoniennes, Édité et développé par Nintendo, et sobrement intitulé : L’Aigle de Guerre. Un jeu intrigant et alléchant, car on ne trouvait pas beaucoup de jeux basé sur le français le plus connu à travers le globe à l’époque. Seule retenue, la vision japonaise de l’histoire française est toujours assez « étonnante ». Sentiment confirmé lorsque l’on lit sur le verso de la boite de jeu et à l’intérieur du livret d’instruction : « le déroulement du jeu est imaginaire et n’a pas la vocation à illustrer d’évènements historiques ». Nous voilà prévenu . . .

Avant de parler histoire, parlons du jeu. Il s’agit d’un jeu de stratégie en temps réel (ou STR), ou vous incarnerez Napoléon,  qui se contentera de donner des ordres à ses généraux, qui eux, devront battre les différents ennemis. Un gameplay qui colle plutôt pas mal à la période historique, et plus particulièrement aux campagnes militaires. On se dit alors que ce jeu peut être finalement une bonne surprise . . .

Napoléon à l »assaut d’un château

Mais dès le départ, un détail fait tiquer. Si la plupart de vos généraux sont bel et bien ceux qui ont côtoyé l’empereur, tel que Jean Lannes, Joachim Murat ou encore Louis-Nicolas Davout, d’autres, comme le dénommé Alessandro Inzaghi, ou Louise Rosset, sont des personnages de fiction. Il s’agit là du premier écart avec la réalité historique, et le moins grave dirons-nous. On passera également sur le peu de ressemblance physique des personnages historiques avec la réalité, ce n’est pas ce qui choque le plus.

Car voici venir LE gros point noir du jeu concernant la réalité historique : il s’agit des nombreux adversaires que l’empereur rencontrera sur sa route. En effet, Napoléon devra tout d’abord écraser les royalistes en Vendée. Seul problème,dans la réalité, il régla le confit vendéen par le dialogue et la négociation, en proposant une paix honorable reposant sur un réel compromis, et non par la force.

Il doit ensuite combattre les Anglais, et en particulier Arthur Wellesley, duc de Wellington (son vainqueur de Waterloo), et l’amiral Nelson (qui batta les armées de Napoléon à Trafalgar), dans un méli-mélo de batailles historiques qui seront gagné par le stratège français . . . Si la réalité historique prend là un grand coup sur la tête, alors que dire quand on voit ces différents adversaires sont secondés par des monstres géants, des sorcières, des vampires et autres joyeusetés issus du monde médiéval-fantastique !! Autant dire que question réalité historique, on repassera !!

Exemple de monstre rencontré

Et ce n’est pas tout, puisque  les développeurs n’hésiteront pas à vous faire combattre des personnages historiques déjà décédées. Ainsi vous devrez affronter Jeanne d’Arc, pourtant brulée depuis plus de 300 ans, Nostradamus, enterré depuis plus de 250 ans, ou encore Marie Antoinette, morte en 1793, soit dix ans avant que Napoléon ne soit sacré empereur !! Cerise sur le gâteau, le boss de fin de jeu n’est ni plus ni moins qu’Alexandre le Grand, disparu presque 2000 ans avant la naissance de Napoléon !! On nage en pleine aberration historique . . .

Au final, ce jeu possède des éléments des campagnes napoléoniennes (personnages, certains lieux, batailles célèbres), mais ces derniers servent de toile de fond à un scénario médiéval-fantastique à mille lieux de la réalité historique. Cela n’est d’ailleurs pas sans rappeler le jeu Jeanne d’Arc, sorti sur PSP, et qui avait fait l’objet d’un précédent article. Au final, cet Aigle de Guerre est un STR plaisant, qui respecte parfaitement les codes du genre, mais la réalité historique passe rapidement au second plan, et c’est bien dommage . . .